Les Naufrageurs redux

Exposition au Port Musée de Douarnenez du 9 avril au 6 novembre 2022
 
Construction du phare : Annelise Nguyên
Réalisation de la piste sonore : Marc-Alexandre Reinhardt
Narratrice : Adrienne Reinhardt
Lanterne : Laurent Cadilhac
Quand Annelise Nguyên, m'a invité à participer à l'exposition ArtBalise au Port-Musée de Douarnenez, plusieurs raisons m'ont poussé à lui proposer une version redux des Naufrageurs, mon installation conçue pour le centre Vox en 2015.

 

Il y avait tout d'abord le thème de l'exposition : les phares et balises. La pièce principale des Naufrageurs est un phare dont le dessin est inspiré à la fois de la Tour de Babel peinte par Brueghel, mais également du Monument à la Troisième Internationale de Tatline. Ce Phare Naufrageur représente l'universalisme, tel qu'il a pu s'incarner dans la philosophie des Lumières, mais corrompu dès son origine par la conquête coloniale menée par les puissances occidentales. Que reste-t-il de ce projet universel – comme l'égalité des droits humains par exemple – dès lors qu'il est instrumentalisé par un projet de domination et d'extraction sans fin des ressources du monde ? Il y a ensuite cette coïncidence, un lien en quelque sorte généalogique entre les Naufrageurs et la Bretagne.

En effet, l'idée de cette exposition est née à l'été 2014 à Douarnenez. J'étais de passage avec mes enfants chez Annelise qui nous avait emmenés en promenade à la Baie des Trépassés. C'est en s'interrogeant sur ce nom tragique et mystérieux que nous en sommes venus à évoquer la légende selon laquelle il fut un temps où des habitants de cette côte allumaient parfois, les soirs de tempête, des feux sur la grève pour égarer des bateaux perdus et pouvoir ainsi en piller les épaves. La discussion nous avait ensuite amenés à faire un lien entre cette légende, l'extrême pauvreté qu'elle raconte, et les naufrages contemporains de migrants en Méditerranée. Huit ans plus tard, force est de constater que cette réalité dramatique, ainsi que l'incapacité européenne à y faire face, n'a pris que plus d'ampleur. Je me suis donc dit qu'il était pertinent de proposer cette œuvre à nouveau, dans le contexte qui l'avait vue naitre, mais sous une forme complètement inédite.